THIERRY HIRIART

Thierry Hiriart, producteur de piment d’Espelette AOP depuis 1996.

« Aujourd’hui le piment d’Espelette c’est une production dans une petite zone, nous sommes un petit point sur Terre où l’on peut produire du piment. On peut vivre décemment du piment. Je ne demande pas à gagner une fortune, juste de pouvoir vendre notre production à un prix correct. »

Quelques dates :

Milieu des années 70 : Eugénie Hiriart, la mère de Thierry et son mari reprennent la ferme familiale.

1996 : Après plusieurs années sans production de piment d’Espelette AOP, Thierry, le fils d’Eugénie relance l’activité avec ses parents.

1999 : Thierry s’installe en reprenant l’élevage de vaches, de race blonde d’Aquitaine. De leur côté ses parents s’occupent de la culture du piment d’Espelette AOP avec 8500 plants et de l’élevage de brebis, manech à tête noire.

2006 : Thierry et sa femme Marie-Laure reprennent l’ensemble de l’exploitation. Ils plantent environ 20.000 plants.

COMMENT ÊTES-VOUS DEVENU PRODUCTEUR DE PIMENT D’ESPELETTE AOP ?

Après mes études à St Palais (Baccalauréat STAE Sciences et Technologies de l’Agronomie et Environnement), j’ai rejoint l’exploitation de mes parents en tant qu’aide familiale. Dans un 1er temps uniquement pour l’élevage, puis nous avons relancé la production de piment d’Espelette AOP.

QUEL TYPE D’AGRICULTURE PRATIQUEZ-VOUS ET QUELS SONT LES MOYENS TECHNIQUES UTILISÉS ?

Nous pratiquons une agriculture de type HVE (Haute Valeur Environnementale). Nos aïeuls comme beaucoup d’autres, faisaient faire les semis de piment d’Espelette par une ferme d’Espelette, Elizaldia. Ils utilisaient la technique « Biper meta ». Cela consistait en un soustrage (une litière) composé d’une couche d’ajoncs coupés, de fumier puis encore d’ajoncs coupés et recouverts de terre. Ils semaient à la volée et recouvraient le tout d’une bâche. Cela créait une chaleur qui permettait au semis de lever rapidement. Les semis étaient toujours réalisés le 19 mars à la saint Joseph.

Aujourd’hui, nous faisons nos propres semis, à la volée mais sans utiliser la technique « Biper meta ».

Pour la plantation du piment, nous faisons partis de la CUMA Bixie Bixia d’Itxassou. Pour le reste, nous avons notre propre matériel.

Entre la production de piment d’Espelette AOP et l’élevage, avec ma femme Marie-Laure, nous travaillons environ 70h par semaine. Nous nous investissons énormément afin de produire des produits de qualité. 

COMMENT S’ORGANISE LA TRANSFORMATION DU PIMENT D’ESPELETTE AOP ? QUELS TYPES DE PRODUITS RÉALISEZ-VOUS ?

Aujourd’hui nous avons notre propre matériel de transformation. Nous transformons uniquement en poudre de piment d’Espelette AOP et en cordes AOP. Nous prenons des saisonniers pour la récolte, pour tout le reste nous réalisons tout nous-même.

Eugénie : À l’époque, ma mère cordait tous les piments puis les passaient au four à pain (feu de bois). Le piment complètement déshydraté était alors passé au pilon que l’on se passait de ferme en ferme. Une fois la poudre réalisée, ma mère la revendait à la famille Borda de la ferme Elizaldia, qui elle-même revendait à un boucher charcutier de Bayonne.

QUELLES SONT LES QUALITÉS À AVOIR POUR ÊTRE PRODUCTEUR DE PIMENT D’ESPELETTE AOP ?

Il faut être patient, assidu et surtout vaillant ! C’est un travail de longue haleine qui nécessite d’être à l’écoute de la nature, de travailler avec elle et non contre elle. Il faut garder à l’esprit que c’est un produit de qualité 

SELON VOUS, QUELS ONT ÉTÉ LES MOMENTS FORTS DE L’HISTOIRE DU PIMENT D’ESPELETTE AOP ?

Sans aucune hésitation, l’obtention de l’AOC en 2000 ! 

QUELLE VISION PORTEZ-VOUS SUR LA FILIÈRE AUJOURD’HUI ?

Être agriculteur est encore plus compliqué qu’avant. En dehors du piment, nous ne sommes pas rémunérés à la hauteur du travail effectué. Pour l’élevage on dépend clairement des aides européennes. « Nous sommes sous perfusion ». Je ne veux pas que l’on en arrive là avec le piment d’Espelette. Le piment d’Espelette a sauvé un grand nombre d’exploitations. Comparé à d’autres filières, cette dernière est encore rémunératrice.

Le problème qui peut se poser aujourd’hui, c’est l’aspect commercial. Beaucoup de producteurs n’ont pas forcement la fibre commerciale et face à des directeurs d’achats de grosses entreprises, ils ne font tout simplement pas le poids. Le fait est qu’il y a moins de producteurs agriculteurs. 

LE PIMENT D’ESPELETTE FÊTE LES 20 ANS DE SON APPELLATION. QUE SOUHAITEZ-VOUS AU PIMENT D’ESPELETTE  ET À SES ACTEURS POUR LES 20 PROCHAINES ANNÉES ?

Que la culture, la production se porte bien malgré les changements climatiques. Que cela reste rémunérateur pour l’ensemble des producteurs. De peut-être retrouver cette entente, cette solidarité qu’il y avait il y a encore 20 ans. 

UNE DERNIÈRE QUESTION. QUEL EST VOTRE PLAT PRÉFÉRÉ AVEC LE PIMENT D’ESPELETTE AOP ?

L’axoa et l’agneau xilindron ! Un régal !