Antoinette ETCHEBARNE

Antoinette Etchebarne, productrice de piment d’Espelette AOP depuis 1971.

« Le piment quand on a commencé, c’était formidable quand même ! Il y avait une super équipe. On continuait à corder les piments pour le séchage, les amis venaient aider. »

Quelques dates :

1971 : Débute le métier de productrice de piment avec ses parents. En parallèle, ils élèvent des vaches laitières.

1993 : Reprise de la ferme familiale Zapataintegia à Espelette. Culture entre 10 000 et 15 000 plants de piment.

1995 : Adhésion à la 1ère CUMA

2004 : Participe à l’élaboration du livre « Le Piment d’Espelette »

2015 : Antoinette s’associe à son fils Mattin dans la culture de piment d’Espelette. Ils produisent chacun 26 000 plants de piment et élèvent des brebis.

Comment êtes-vous devenue productrice de piment d’Espelette AOP ?

Tout a commencé avec mes parents. Mon père, berger pendant 30 en Californie est revenu au pays. Mes parents se sont installés à Espelette, ils élevaient quelques vaches et afin de compléter leurs revenus, ils ont commencé la culture de piment avec environ 3000 plants.

J’ai intégré la ferme familiale après avoir suivi une formation agricole à Espelette. Nous étions formés sur la biologie, les animaux mais aussi en couture, cuisine, puériculture. C’était très diversifié. Il fallait avoir les bases pour tenir une maison et une ferme.

Quel type d’agriculture pratiquez-vous et quels sont les moyens techniques utilisés ?

Avec mon fils avec qui je me suis associée nous pratiquons une agriculture raisonnée. Nous employons certains traitements phytosanitaires utilisables en agriculture biologique contre quelques ravageurs et bactéries. Nous sommes plus adeptes du préventif que du curatif.

Le travail de la Terre n’est comparable à aucun autre. Il faut aussi faire avec la météo et trouver le bon moment pour travailler la terre car le piment est fragile.

Pour le désherbage et la récolte nous engageons des saisonniers via le GEA (Groupement d’Employeurs Agricole).

Avant on faisait avec les amis, la famille. Il y avait aussi de l’entraide avec les autres fermes. Aujourd’hui avec les contrôles, il y a moins de solidarité.

J’ai toujours eu une activité secondaire : élevage de brebis, vaches, canards.  Il y a des années où la culture de piment d’Espelette n’aboutit pas. Tu ne peux pas vivre que de ça. Ceux qui vivent que de ça, je pense que c’est dur pour eux.

Comment s’organise la transformation du piment d’Espelette AOP ? Quels types de produits réalisez-vous ?

Lorsque j’ai débuté dans la culture du piment d’Espelette avec mes parents, on cordait tous les piments pour le séchage. Elles étaient séchées dans la cuisine et sur la façade de l’etxe (maison). Puis, les fruits étaient passés dans un four à bois. La transformation en poudre, elle, s’effectuait grâce à un pilon qui passait de ferme en ferme.

Puis quand je me suis mise à mon compte j’ai fait partie de la CUMA Bixi Bixia à Itxassou afin de disposer du matériel nécessaire à la transformation modernisée du piment d’Espelette.

On amenait les cordes entières que l’on faisait sécher dans le four. A chaud on équeutait tout et on broyait. On attendait que tout le monde ait fini et on nettoyait l’ensemble du matériel en groupe. C’était de très bons moments passés tous ensemble. Puis, petit à petit, l’achat de matériel personnel nous a simplifié le travail et permis d’être autonomes. Nous avons tout le matériel nécessaire : planteuse, plastifieuse, four, broyeur.

Concernant les produits AOP, nous avons longtemps fait des cordes et de la poudre. A présent, nous transformons uniquement en poudre que nous revendons à des magasins de produits alimentaires

Aujourd’hui la culture de Piment d’Espelette me permet de vivre décemment. A l’approche de la retraite, mis à part la récolte j’effectue toutes les étapes de la culture. Je travaille environ 50 h par semaine.

 Quelles sont les qualités à avoir pour être producteur de piment d’Espelette AOP ?

Il faut être passionné, tenace, ne pas se laisser décourager. C’est un travail de longue haleine. Tous les ans c’est différent. On ne peut pas savoir à l’avance si l’année va être bonne. Il faut attendre le résultat final. C’est une bataille de tous les jours.

Selon vous, quels ont été les moments forts de l’histoire du piment d’Espelette AOP ?

La création du Syndicat du piment d’Espelette. Cela m’a beaucoup aidé car j’étais seule. Les réunions et les autres producteurs m’ont tiré vers le haut. Ça m’a permis d’aller de l’avant. J’ai d’ailleurs fait partie du conseil d’administration au début avec d’autres productrices. Et bien sûr lorsque le piment a obtenu l’AOC ! Nous avons organisé une superbe fête le jour même de la fête du piment.

  Quelle vision portez-vous sur la filière aujourd’hui ?

Nous n’aurions pas imaginé ça au début. Ça a tellement évolué. Il faut respecter l’appellation. Le contrat tu le signes ou tu ne le signes pas. Tu suis ou tu ne fais pas de piment.

Le piment d’Espelette fête les 20 ans de son appellation.

Que souhaitez-vous au piment d’Espelette et à ses acteurs pour les 20 prochaines années ?

Que cela continue pour les futures générations de producteurs. Pour les enfants des 1ers producteurs.

Une dernière question. Quel est votre plat préféré avec le piment d’Espelette AOP ?

Tout simplement avec la soupe ! Et avec les chipirons à la tomate.